Au coeur du confinement, mes rencontres avec le curé
Mon stage à la Voix du Nord est suspendu ! Pas de télétravail. Au téléphone, ma tutrice Delphine Deslée vient de me l’annoncer. L’une après l’autre, je descends les marches de l’escalier en bois en informer le curé. « Tu peux compter sur ma présence, dit-il ». Trois fois par jour, nous allons sur nos balcons. Le matin, vêtu de son pyjama rayé de noir et blanc, il se place sur sa mezzanine en planche. Ses longs cheveux blancs réclament un tour de tondeuse. De sa voix rauque, il m’appelle. « Bertrand !». Je réponds avec un sourire, « Oui père ! ». Sa barbe a beaucoup poussé. Elle couvre ses lèvres. Le cadre doré de ses lunettes est posé au bout de son nez. Ses verres laissent s’échapper le reflet du vitrail arrosé par la lumière du soleil. La routine du jeu question-réponse va commencer. « Bonjour, comment as-tu dormi ? demande-t-il, As-tu un problème ou un besoin particulier ? Bonne journée de travail ». Mes réponses sont invariables : « Bonjour, j’ai passé une bonne nuit mon père ! Tout va bien. Merci ». Chacun retourne dans son appartement.
Assis sur mon fauteuil Louis XV couvert d’un tissu bordeaux, je prends la télécommande posée sur un pouf en cuir noir. Mes jambes sont allongées sur la table en bois massif ; ma main droite tient la tasse dans laquelle baigne le sachet thé à la menthe. Je zappe d’abord sur BFM TV pour l’actualité courante. Euronews et CNN viennent après. Sous la pression de mon pouce droit sur le bouton démarrage, mon ordinateur se met en marche. Le parcours des « Une » du Figaro, la voix du Nord, Lacroix vient mettre fin à cet exercice de veille sur l’actualité. J’approfondi les techniques de montages vidéo des reportages sur le logiciel Première pro à partir des tutoriels de YouTube.
Du clocher de l’église s’échappent les douze coups de midi. A cet instant, le père Bruno m’attend sur le balcon pour dire la prière de l’Angelus. A l’ouverture de sa porte, l’odeur des frites de pommes ravive ma faim. « Père Marc, dit-t-il, as-tu fait à manger ?». Ma réponse, « Oui ! ». « C’est bien, poursuit-il, bon appétit ». Ma réplique, « Merci père. Bon appétit et bonne sieste à toi ». Mon après- midi est consacré aux devoirs de droit, presse écrite et le podcast. Les jours sont longs et le contrôle du temps échappe au printemps. L’appel du curé me rappelle le temps : 20h. « Marc Bertrand, va-t-il dire, as-tu écouté le point sur le coronavirus ?». « Oui mon père : il y a beaucoup de personnes guéries et de moins en moins sous appareil respiratoire. Bonne nuit mon père » vais-je répondre. Ainsi, mes journées de confinement se suivent et se ressemblent.
Marc Bertrand
"Pour s'améliorer, il faut changer. Donc, pour être parfait, il faut avoir changé souvent".
- Winston Churchill